Gestion des sols et des couverts végétaux en production Agro-Synergique : le pourquoi et le comment

Gestion des sols et des couverts végétaux en production Agro-Synergique : le pourquoi et le comment

Gestion des sols et des couverts végétaux en production Agro-Synergique :
le pourquoi et le comment

Les fervents de la santé du sol ont appris la valeur de la biomasse enchevêtrée qui pousse au-dessus du sol dans un mélange de couverts diversifiés ; une diversité similaire bénéficie aux systèmes racinaires du sol et à tout le microbiote qui l’environne. Ainsi, nous cherchons à obtenir un système racinaire qui explore tous les coins du sol avec de grosses racines verticales profondes et de petites racines horizontales à faible profondeur. Stocker le carbone dans le sol est critique pour améliorer la santé du sol et le carbone dégagé par le cycle des
racines est plus stable que celui des parties aériennes de la plante.
Le but de cet enherbement est, en particulier, d’obtenir une vigne autosuffisante en azote et naturellement plus à même de puiser les macros et microéléments du sol. La matière organique accumulée en profondeur produit un humus stable nécessaire à la texturation du sol et un humus plus labile qui est métabolisé par le microbiote du sol pour ses besoins nutritionnels propres, mais en retour, la vigne profite des sous-produits de leur métabolisme. L’azote n’est plus donc fournit à la plante par la seule minéralisation et l’appauvrissement du stock de matière organique du sol, mais aussi par la fixation de l’azote atmosphérique inépuisable par certains des micro-organismes du sol. Ces derniers deviennent in fine source de nutriments pour notre plante. Le cycle est bouclé. La colonisation des racines de la vigne par des champignons ecto ou surtout endophytes est un fait acquis. Grâce à un tissu microscopique extrêmement dense et ramifié, ces mycorhizes
permettent d’améliorer la connexion du système racinaire de la vigne avec son sol. Sa nutrition s'en trouve facilitée (l’assimilation du phosphore par exemple est grandement facilitée par cette symbiose ce qui explique l’absence de besoin de fertilisation exogène), sa résistance aux parasites et son alimentation en eau en période de restriction améliorée.

 

Activité biologique et microbiote rhizosphérique

En retour, la vigne consacre une part significative de sa photosynthèse pour fournir le carbone métabolisé que ces microorganismes sont incapables de produire. Une vigne trop bien nourrie, artificiellement ou naturellement, n’aura pas besoin de ces symbiotes et ne les invitera donc pas ! Dans ces conditions, elle perdra le bénéfice de leurs interactions positives lorsque les conditions du milieu se dégraderont. Il faut donc toujours garder à l’esprit qu’une certaine
« austérité » de la nutrition de la vigne est en fait nécessaire à son équilibre et à sa résilience à long terme en cas de modification brutale et négative de l’écosystème. Nous utilisons des outils de mesure biométriques de la quantité et de la diversité du microbiote complexe de nos sols en utilisant des techniques de biologie moléculaire innovantes. Nous pouvons ainsi suivre l’évolution des différents types de bactéries, nématodes, champignons libres et mycorhizes de la couche superficielle et de la rhizosphère pour contrôler leur évolution et la qualité de leurs interactions. Le taux de mycorhization des racines de la vigne demeure
néanmoins difficile à quantifier facilement. Nous cherchons à obtenir un microbiote à dominante de champignons humigènes et moins de bactéries
minéralisatrice avec une proportion d’endomycorhizes forte et un ratio entre
nématodes phytophages/omnivores/carnivores équilibré. La mesure des activités
minéralisatrice du cycle du Carbone et de l’Azote nous permet de quantifier
l’activité biologique du sol et ses apports en nutriments.

Contrairement à la communication ambiante, il n’est pas nécessaire d’implanter des arbres au milieu des vignes pour qu’elles puissent être mycorhizées…Si tel était le cas, alors cela révèlerait un problème inquiétant au niveau du sol concerné…Les arbres sont-ils des facilitateurs de mycorhization pour la vigne ? Rien ne l’a encore prouvé car leurs mycorhizes sont assez différents de ceux de la vigne. Les racines des arbres abritent effectivement de nombreux champignons, mais certains se révèlent aussi des pathogènes pour la vigne (pourridié Armilaria sp.). De même, si le sujet de l’enracinement profond de la vigne est légendaire, il est surtout une légende… On cite souvent des enracinements de plusieurs mètres ou dizaines de mètres en profondeur dans le sol, mais il s’agit surtout de fables…L’essentiel de l’enracinement efficace de la vigne se situera, selon les sols entre 50 cm et 2 m, c’est dans ces horizons que la vigne peut se nourrir efficacement. Au-delà, on peut parfois trouver des racines exploratrices de plusieurs mètres, voire dizaine de mètres, surtout horizontales, et parfois plongeantes dans des
sols particuliers, comme les sols rocheux profondément fracturés (calcaire, schistes), mais pas vraiment dans les sols « classiques » où la disponibilité en oxygène se raréfie trop en profondeur rapidement pour autoriser leur installation et leur fonctionnement… De la même façon, la nécessité d’un sol profond pour permettre à la vigne d’exprimer la complexité d’un terroir est une autre fable : on peut élaborer de grands vins sur des sols profonds ou très superficiels à condition que leur texture et leur structure permettent au système racinaire de fonctionner de manière équilibrée. Un sol superficiel, si la roche mère est
suffisamment poreuse et autorise une réserve en eau et un garde-manger suffisamment disponibles, peut parfaitement produire des vins exceptionnels comme sur le plateau de Saint-Emilion où les gallo-romains ont excavé des rigoles dans le rocher calcaire à Astéries (amas d’étoiles de mer de l’ère tertiaire) sur quelques dizaines de centimètre et les remplissant de terre de palus pour pouvoir y planter la vigne. Sur ces sols très superficiels, l’enracinement de
la vigne est limité et pourtant la vigne n’y souffre jamais d’une contrainte hydrique excessive, notamment l’été où l’eau contenue dans le calcaire poreux (qui n’est pourtant pas colonisé par les racines) participe activement à l’alimentation en eau de la vigne par le biais de remontées capillaires à la manière d’une éponge.
Nous ne cherchons pas dans notre organisation Agro-synergique à faire des semis systématiques, à l’aide de semences exogènes, destinés à être enfouis chaque année (engrais vert), car le taux de matière organique du sol n’est pas durablement et positivement impacté avec cette technique et l’apport d’azote éventuellement trop brusque et limité à la fin du printemps. L’enherbement permanent couché, ou tondu au pire, est à privilégier. La vigne, a fortiori si elle doit produire de grands vins rouges et à l’opposé des besoins pour élaborer des vins blancs ou rosés, s’accommode mal d’une nutrition azotée trop importante, mais elle a besoin d’une disponibilité régulière aux moments clés de son développement et il ne faut pas hésiter à lui fournir si un déficit était détecté. Pour ce faire, si nécessaire, nous avons à notre disposition des composts animaux (fiente de poules, compost de plumes, guano de poisson) d’origine biologique pour remplir cette fonction dès le printemps, en apport localisé sous le rang afin de les réserver préférentiellement à la vigne. En outre, sachant qu’il existe des différences profondes entre les systèmes racinaires des espèces spécifiques et que chaque type de sol doit posséder un couvert végétal lui correspondant intrinsèquement, nous préférons gérer le couvert végétal de nos vignobles par un enherbement à dominante naturelle. Rapidement, les espèces endémiques recolonisent le
milieu et se développent concomitamment avec les espèces installées initialement en se succédant au fil des saisons car nous les laissons fleurir et se repiquer naturellement. On obtient ainsi une biodiversité accrue et surtout parfaitement bien adaptée à chaque écosystème. Un relevé de la biodiversité aérienne ainsi que souterraine et des différentes espèces bio-indicatrices caractéristiques des parcelles de chaque terroir et microclimat doit être réalisé annuellement pour suivre quantitativement qualitativement la biodiversité
des écosystèmes cultivés. On peut aussi en réalisant un semis sur place, non destructif de l’ancien, compléter la flore si des besoins particuliers se font sentir en terme de structuration du sol (semis de seigle, radis fourrager…) ou de fourniture d’azote (semis de trèfle, de fèverole, vesce de Narbonne…) par exemple. Tous les dix ans environ, cet enherbement permanent naturel doit souvent être détruit car des espèces concurrentielles vis-à-vis de la vigne, tel le fameux chiendent Elymus repens, ont tendance à coloniser excessivement le milieu et à devenir concurrentiel.
Le couvert végétal se développe sur une hauteur de 55 à 80 cm selon les espèces jusqu’à la fiin du printemps. Nous attendons la floraison des plantes et la lignification de leurs tiges ; le couvert est alors fauché ou couché pour créer un mulch végétal naturel qui se décomposera ensuite lentement sur le sol sans être enfouis. La répétition au cours des années de cette pratique simple permet d’enrichir considérablement le niveau de matière organique totale et
de doper durablement l’activité biologique du sol et de régénérer par semis naturel les espèces endémiques. Selon le régime pluviométrique de l’année, le couvert végétal peut être tondu sur place une ou deux fois au plus ; plus généralement nous laissons le couvert s’équilibrer naturellement.
Il est souhaitable de pratiquer le couchage ou la tonte aux alentours de la montée à graine car c’est à ce moment que les réserves sont accumulées au maximum dans les parties aériennes, que la lignification des tissus est bien développée et qu’un auto-semis pourra se réaliser. Une autre justification est de simuler la pâture du couvert végétal. En effet, un couvert laissé à la pousse en permanence n’accumulera pas ni la même quantité, ni la même qualité de réserve dans les tissus. Quand une plante du couvert est coupée, il ne lui reste que très peu de capacités de créer les éléments nécessaires pour la formation de nouvelles cellules végétales par photosynthèse. Il est donc indispensable que l'herbe, au moment de sa coupe, possède dans ses racines ou les bases de ses tiges des réserves suffisantes qui permettront la formation une certaine partie verte, laquelle, par photosynthèse, permettra alors la croissance normale de la plante. Toute nouvelle croissance, c'est-à-dire toute repousse de nos plantes d'herbages, se produit toujours aux dépens des substances organiques élaborées précédemment (avant la coupe). Si on coupe ou couche donc le couvert avant que les racines et la partie non coupée aient emmagasiné suffisamment de réserves, la repousse sera difficile et peut même ne pas se faire du tout.

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