Pourquoi et comment la biodynamie performe-t-elle vraiment ?

Pourquoi et comment la biodynamie performe-t-elle vraiment ?

Pourquoi et comment la biodynamie pérforme-t-elle vraiment ? Beaucoup de débats, force travaux soi-disant « scientifiques » à l’appui ont cherché à démontrer systématiquement la supériorité du système biodynamique vis-à-vis du biologique et bien sûr du conventionnel. La grande majorité, pour ne pas dire la totalité, des démonstrations de ces performances par les ténors biodynamistes reposent généralement seulement sur de fameuses (fumeuses) observations. Ces observations ne s’accompagnent généralement pas (pour ne pas dire systématiquement) de mesures objectives dans le cadre de protocoles expérimentaux dignes de ce nom. En effet, sans vouloir se lancer dans un commentaire détaillé du Cours aux Agriculteurs de R. Steiner au niveau épistémique, on est d’emblée frappé par l’étrange mélange des genres qui y règne en termes de savoirs. On y trouve d’abord de nombreuses références à des savoirs que l’on pourrait qualifier de paysans au sens où ils semblent renvoyer à une tradition et à une sagesse supposées propres à cet univers et liées à l’expérience directe de la terre. Exprimés dans les dictons ou les almanachs, ces savoirs, par exemple ceux qui concernent la prise en compte des cycles lunaires, sont revalorisés par Steiner pour leur pertinence et leur rapport direct à l’expérience de la nature, là où la science les renvoie dans la sphère des superstitions. Steiner semble rechercher en permanence un rapport direct aux «structures de la nature» et il est fait référence à différentes reprises à une sagesse instinctive, à l’intuition, voire à la clairvoyance qui offrirait ce rapport bien plus direct que ne le font la science ou les livres. Une citation illustre clairement cette dichotomie entre savoirs sensibles et savoirs intellectuels : « Oui, l’homme instruit dit que le paysan est bête mais en réalité, ce n’est pas vrai […] pour la bonne raison que le paysan est en vérité un homme qui médite […]. La seule chose qui lui manque encore, c’est de pouvoir formuler cette connaissance. Celle-ci est soudainement là. On marche dans les champs et soudain, on sait. On sait d’abord, on essaie ensuite. […] En fin de compte, la vie et l’activité dans la nature sont d’une essence tellement subtile qu’elles passent à travers les mailles grossières des concepts intellectuels. C’est l’erreur qu’a commise la science moderne. » La critique de la science dans le « Cours aux agriculteurs » est donc récurrente et profonde. Mais elle porte essentiellement sur des éléments spécifiques du cadre scientifique, le réductionnisme, le rapport trop éloigné à l’empirie mais surtout, le matérialisme extrême. Elle ne saurait signifier un rejet en bloc chez Steiner qui revendique au contraire une certaine scientificité. Même s’il a essentiellement étudié la philosophie, discipline sur laquelle il fonde ses réflexions sur la nature de la connaissance et les rapports à la science, Steiner semble avoir également pour l’époque une culture scientifique profonde. Il est pourtant diplômé d’une des plus anciennes et prestigieuses écoles d’ingénieurs autrichiennes, l’École supérieure technique de Vienne, et s’est passionné pour les sciences naturelles contemporaines, notamment les travaux d’Ernst Haeckel, un des pères de l’écologie scientifique, et de Darwin. Cet état de fait est l’origine de la fréquente défiance à l’égard de la démarche biodynamique. Et si la « science dure et matérialiste » pouvait expliquer certaines performances de la biodynamie ? Différents travaux ont bien sur été conduits pour comparer les performances agronomiques de la biodynamie (https://www.bio-dynamie.org/wp-content/uploads/2018/07/L%E2%80%99agriculture-biodynamique-une-synth%C3%A8se-scientifique.pdf), mais malheureusement la grande majorité des protocoles font varier beaucoup de paramètres simultanément ce qui les empêche souvent d’être sérieusement conclusifs… Nombreuses sont les observations et retour d’expériences sur une meilleure résistance du vignoble en biodynamie vis à vis des parasites comme le mildiou (Plasmopara viticola), l’oïdium (Unicinula necator) et la pourriture grise (Botrytis cinerea), les champignons les plus communs parasites de la vigne. De même, la résistance aux stress abiotiques (thermiques et hydriques), élément important de la résilience du vignoble et de la qualité de ses productions, est réputée plus importante en biodynamie. A côté des diverses non preuves d’efficacité des préparats biodynamiques associés au cuivre et au soufre, il existe différents travaux scientifique comparant les performances de la viticulture classique utilisant la pharmacopée chimique par rapport à la biologique (cuivre et soufre exclusivement) ou à la biodynamiques (préparation 500 et 501 obligatoirement, tisanes et décoctions associées pour réduire les doses de cuivre cumulées). Plusieurs de ces travaux (https://www.nature.com/articles/s41598-018-35305-7; https://oeno-one.eu/article/view/2470). ont permis récemment de démontrer et de quantifier l’incidence de la gestion biodynamique sur les niveaux de défenses naturelles de la vigne en montrant qu’elle pouvait augmenter significativement et notablement le niveau de ces défenses et donc la qualité de sa résistances aux stress biotiques ou abiotiques. L’interprétation de cette meilleure performance est souvent directement associée à une expression différente de la vigueur et une production plus limitée, facteurs souvent débilitants de la viticulture conventionnelle, mais pas toujours. Ainsi, on ne peut pas encore conclure sur l’origine de la stimulation de la réponse de la vigne. Elle pourrait être due simplement à un stress permanent et tout simplement plus intense en biodynamie, situation induisant naturellement une synthèse plus importante de facteurs de résistance aux stress…Néanmoins, on peut dire que ça marche ; tout du moins quand la pression des pathogènes n’est pas excessivement importante. Mais sont-ce la dynamisation et les préparats qui sont réellement à l’œuvre ? Quoi qu’il en soit, il faut bien reconnaitre que, la combinaison des préparats biodynamiques à l’avantage par rapport à la simple agriculture biologique de pouvoir réduire plus facilement les doses de cuivre cumulées sans utiliser de molécules organiques de synthèse plus indésirables. Parmi les différents préparats biodynamiques réputés activer le métabolisme de la plante, le silicium intervient dans plusieurs d’entre elles : dans la silice de corne (501) en premier lieu, mais aussi les tisanes de prêle ou de pissenlit. Si l’on s’en tient à l’interprétation antroposophique, les influences des énergies solaires et cosmiques sont diffusées par la silice dans leurs qualités respectives directement ou indirectement dans la plante. La silice met la plante en relation avec le cosmos en s’associant à la lumière et à la chaleur et transmet l’activité des forces formatrices des étoiles fixes et des planètes supra-solaires (Mars, Jupiter et Saturne). La science matérialiste montre que le silicium est un élément important pour les plantes notamment dans leur croissance, leur solidité mécanique, leur nutrition minérale et leur résistance dans un milieu difficile et face aux maladies et parasites (https://soin-de-la-terre.org/wp-content/uploads/Silicium-l%c3%a9l%c3%a9ment-longtemps-oubli%c3%a9-des-plantes-terrestres-_Jean-Georges-Barth.pdf; https://www.researchgate.net/publication/5924551_Silica_in_Plants_Biological_Biochemical_and_Chemical_Studies; https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC42876/pdf/pnas01532-0027.pdf). En effet, à concentration élevée dans le milieu de culture, le silicium influence favorablement la croissance d’une plante. De plus, de par son accumulation dans les parois végétales, la silice augmente leur stabilité et leur robustesse structurelle permettant de maintenir un port érigé et une disposition foliaire favorable à la captation de la lumière donc à la photosynthèse. L’activité du métabolisme des racines est également améliorée par une teneur suffisante en silice. D’un point de vue nutritionnel, la silice permet d’atténuer les déséquilibres et de modifier l’absorption des nutriments du milieu et le transport par les plantes de certains éléments essentiels (Ca, P, K, Mg). Ensuite, le silicium intervient dans l’état sanitaire des plantes. L’accumulation du silicium dans les parois végétales, plus importante dans un milieu enrichi, agit contre la pénétration des agents pathogènes insectes et champignons. Ce rôle positif concernant la résistance aux pathogènes, notamment pour le raisin, est aussi constaté lors d’application foliaire de silice. Les défenses naturelles déclenchées ou stimulées par le silicium permettent ainsi d’atténuer les effets de stress abiotiques (toxicité des métaux lourds, sécheresse, excès d’eau, vent, températures extrêmes et salinité) et biotiques (insectes, herbivores, nématodes, champignons, bactéries et virus). Mis à part un port plus érigé et une plus forte teneur en chlorophylle (et simultanément en flavones marqueurs de réaction au stress) des vignes traitées à la 501, la science dure n’explique pas ce que les biodynamistes revendiquent à tous crins à savoir « l’effet lumière » de la silice…Et s’ils avaient raison ? Le quartz correspond à du dioxyde de silicium cristallisé qui, a l’état extrêmement divisé et placé à la surface du feuillage, pourrait posséder les propriétés de cristaux photoniques. Les cristaux photoniques sont des structures nanoscopiques qui modifient la propagation des ondes électromagnétiques. Ces structures, analogues aux semi-conducteurs de la physique du solide, présentent des bandes de fréquences interdites à la propagation de la lumière. Ils sont appelés photoniques car ils interagissent avec les échelles de la lumière visible (400 nm à 700 nm). On parle ici de « couleur physique », dans le sens où il n’y a pas un pigment responsable de la coloration mais une couleur qui résulte d’un phénomène d’interférences lumineuses. Ainsi un cristal photonique change de couleur selon l’indice du milieu dans lequel il est observé L’opale est le plus connu des cristaux photoniques minéraux naturels. Dioxyde de silicium hydreux (ou gel de silice), l’opale se distingue des minéraux des autres groupes du quartz par une structure cristalline toujours amorphe. Il existe aussi des structures purement biologiques possédant les mêmes propriétés. Dans les régions tropicales, les plantes vivant sous la canopée sont soumises à des conditions de luminosité particulièrement peu favorables. Les végétaux des étages supérieurs ayant capté l’essentiel de la lumière solaire, principalement dans les radiations rouges et bleues, il ne reste aux plantes de sous-bois qu’une faible quantité de lumière, dans les longueurs d’ondes vertes principalement. Comment effectuer la photosynthèse dans ces conditions ? Certains membres du genre Begonia disposent pour cela de structures originales : les iridoplastes. Les Begonia sont des plantes typiques des sous-bois peu éclairés des forêts tropicales. Les iridoplastes, localisés dans l’épiderme des feuilles de Begonia, sont des chloroplastes modifiés où les granums présentent un espacement régulier de 170 ± 20 nm. Les granums d’un iridoplaste sont formés d’un nombre constant de thylakoïdes, trois en moyenne. Cet arrangement périodique des granums confère aux iridoplastes les propriétés d’un cristal photonique (https://planet-vie.ens.fr/thematiques/cellules-et-molecules/biophysique/les-iridoplastes-ces-chloroplastes-iridescents). Au niveau macroscopique, cela se traduit par l’iridescence des feuilles de Begonia, qui présentent une coloration bleue variable en fonction de l’angle d’observation. Au niveau microscopique l’iridescence est due à des phénomènes d’interférence. Ces interférences sont responsables d’une diminution de l’absorption des longueurs d’ondes bleues (interférences destructives) mais d’une augmentation de l’absorption des longueurs d’ondes vertes et rouges (interférences constructives) par la plante. La structure particulière des iridoplastes permet ainsi de favoriser la photosynthèse en augmentant la capture de lumière aux longueurs d’onde vertes disponibles en milieu ombragé d’une part et en augmentant de 5 à 10 % le rendement quantique de la photosynthèse dans des conditions de faible luminosité d’autre part. Même si d’autres études restent à réaliser pour le démontrer, les iridoplastes pourraient donc constituer un avantage sélectif pour les plantes qui en sont dotées en dopant leur métabolisme. Les caractéristiques modifiées du feuillage des vignobles traitées à la préparation 501, dans leur aspect d’abord (iridescent) et dans leurs performances ensuite (teneur en chorophylle, activité photosynthétique), pourraient donc peut-être s’expliquer par les interactions électromagnétiques de la silice pulvérisée plutôt que par « l’esprit éthéré » des « êtres élémentaux » antroposophiques ? Une piste de toute façon à creuser car prometteuse. Une autre caractéristique très intéressante en biodynamie concerne la biodiversité et les fonctionnalités du microbiote des vignobles. Les agroécosystèmes sont des systèmes naturels gérés par l’homme mais restent soumis aux règles écologiques générales. Le microbiote du sol et de la rhizosphère influence d’une manière importante les relations entre la vigne et son environnement. Les techniques modernes de séquençage des génomes (métagénétique et métagéomique) permettent désormais d’accéder à la connaissance de ce microbiote complexe de manière inédite (https://doi.org/10.1101/2020.03.12.983650 ). Ainsi, on observe que les communautés microbiennes allaient de l’arrangement aléatoire jusqu’à des réseaux très intégrés avec différents niveaux de spécialisation fonctionnelle dans chaque niche. Les pratiques culturales à faible intervention, c’est-à-dire des approches organiques aux approches biodynamiques et avant tout le non travail des sols, favorisent ainsi des réseaux microbiologiques (bactéries et champignons) densément regroupés. Ceci décrit un état d’équilibre basé sur des communautés mixtes (généralistes-collaboratives). Au contraire, dans les vignobles gérés de façon conventionnelle, on observe des communautés très modulaires, spécialisées dans des niches, avec un degré plus élevé de sélection et de co-exclusion qui sont plus sensibles aux stress de leur environnement. Des différences géographiques dans la nature et la complexité taxonomique de ces réseaux microbiens existent et sont notablement influencés par les caractéristiques abiotiques des sites, notamment de leur degré de sécheresse, mais les différences organisationnelles entre systèmes de conduite décrites demeurent les mêmes quel que soit le lieu. Ainsi, les réseaux plus densément regroupés et collaboratifs tels que ceux classiquement observés en viticulture biologique et plus encore biodynamique, sont réputés plus résilients et susceptibles de conférer une meilleure résistance aux stress abiotiques et potentiellement biotiques. Ces observations peuvent être étendues aux mycorhizes ecto ou endophytes, qui sont notamment importants dans l’alimentation phosphatée et la restriction au stress hydrique de la plante, notablement négativement affectés par l’intensification de l’agriculture (https://doi.org/10.1038/s41396-019-0383-2). A ce stade on ne sait toujours pas encore le pourquoi de ces résultats. Est-ce principalement le résultat des préparats et des composts dynamyés ou leur combinaison souvent avec le non travail du sol, ou la combinaison de tout cela sous l’influence des astres ? Il existe encore beaucoup de travail si on cherche à bien comprendre ces résultats afin de mieux les reproduire et de les adapter aux diverses situations. Il n’en demeure pas moins que ce qui vient d’être montré ici est particulièrement excitant ; l’infâme science réductioniste et matérialiste pourrait apporter un peu plus d’eau au moulin de la biodynamie que les principes dogmatiques de Steiner qui ne donnent aucun mécanisme explicatif réels et appellent uniquement à la foi de ceux qui voudront bien croire. Une fois de plus, une bonne idée n’a pas besoin de mauvais arguments pour être défendue.
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