Pourquoi je ne serai jamais Biodynamiste

Pourquoi je ne serai jamais Biodynamiste

Bon c’est décidé, je vais désormais consacrer le reste de mon existence sur cette planète à lutter contre l’agronomie chimique productiviste au service de l’industrie agro-alimentaire mondialisée et du grand capital exploiteur. Je devrais donc logiquement passer à l’agriculture biologique mais les bien-pensants et surtout les « stars » de la viticulture me trouvent petit joueur si je n’ai pas l’ambition, après ma conversion, de devenir un biodynamiste convaincu et faire ainsi partie du club des grands. Globalement, le plus gros à faire après la transition au Bio et une période d’exploitation de quelques années pour attester du sérieux de ma transition, avant de pouvoir m’identifier pleinement à tous les concepts de l’anthroposophie de ce cher Rudolf, c’est de passer obligatoirement à la bouse de corne ! En effet, l’obligation première pour être certifié par DEMETER (ou BIODYVIN), après respecter a minima le référentiel de l’agriculture biologique, c’est d’utiliser au moins une application de la préparation 500, la fameuse préparation dynamisée de bouse de corne. En biodynamie, l’usage de « préparations » spécifiques est de mise. Ces aspects n’ont pas été retenus par l’agriculture biologique moderne ; ils proviennent essentiellement de courants de pensée mystiques à la mode dans l’Allemagne romantique du début du XXe siècle. On les retrouve aussi en homéopathie avec l’idée « dynamisation », même si elle y possède un sens bien différent dans ce cas précis. L’usage de produits auxiliaires ou « préparations » occultes fait donc principalement la spécificité de l’agriculture biodynamique. Ces préparations, au nombre de 8, ont été dictées par Rudolf Steiner sur la base de ses « intuitions », et continuent d’être pratiquées dans la biodynamie actuelle. Il y a six préparations à ajouter au compost et deux préparations à pulvériser sur les cultures, et ce à dosage « homéopathique ». Ces préparations doivent être chargées de sentiments et de « forces cosmiques », selon Steiner. Elles sont faites de quartz, de fumier de bovin, de six plantes et d’organes animaux. On y trouve deux préparations à pulvériser dans les champs (bouse de corne et silice de corne) et six préparations à composter (préparation d’achillée millefeuille, préparation de camomille, préparation d’ortie, préparation d’écorce de chêne rouvre, préparation de pissenlit et préparation de valériane). Ces « préparas » sont autorisés dans le règlement (CE) n° 834/2007 du Conseil de l’Union européenne qui définit les objectifs, principes et règles applicables à la production biologique. Il existe aussi des préparations à base d’animaux incinérés, toujours utilisée sous la forme de dilutions homéopathiques. Les préparations anthroposophiques sont pour la plupart obtenues au travers d’un processus de fermentation dans des organes animaux : vessie, mésentère, intestin et crâne d’animal domestique. Mais la vache, sa bouse et ses cornes représentent un élément central du mode d’action biodynamique. Selon DEMETER, « appliquée au printemps sur terre réchauffée et/ou à l’automne sur terre encore chaude, elle est un puissant édificateur de la structure du sol, un activateur de la vie microbienne. Elle favorise la formation de l’humus, l’absorption hydrique et peut donc réduire la nécessité d’arrosage. Cette préparation stimule la faculté de fixation du CO2 dans les sols et régule le pH du sol en accroissant celui des sols acides et en atténuant celui des sols alcalins. Elle stimule la croissance générale du système racinaire et particulièrement son développement vertical vers la profondeur, la roche-mère, où se trouvent les minéraux spécifiques au terroir. Elle est donc particulièrement intéressante pour les vignerons, qui cherchent à renforcer le lien intime de la vigne avec son terroir et à élaborer des vins uniques. Elle peut également aider à lutter contre les phénomènes de salinisation. La bouse de corne est élaborée en introduisant de la bouse de vache dans une corne d’une vache qui a vêlé au moins une fois. Bien évidemment, aucun animal n’est tué pour l’élaboration des préparations, ni même écorné (interdit par le cahier des charges Demeter). Les cornes sont récupérées sur des animaux abattus à d’autres fins. La corne remplie est ensuite enterrée de l’équinoxe d’automne à l’équinoxe de printemps ». Mais pourquoi cette obsession de la vache ? L’intérêt semble d’abord motivé par les performances digestives uniques de l’animal ruminant. Mais quel est l’intérêt pour sa corne ? « La vache a des cornes afin d’envoyer dans son propre corps les forces formatrices astrales et éthériques qui doivent déployer tous leurs efforts dans ce sens pour progresser jusqu’au système digestif, de telle manière que dans ce système se développe un travail intense par l’intermédiaire précisément du rayonnement provenant des cornes et des sabots. » R. Steiner, Cours aux agriculteurs 4e conférence. Tout ceci étant exposé, et nonobstant le cas des vaches sans corne qui manifestement continuent de digérer, pourquoi de la bouse dans de la corne ? « Le regard de la science spirituelle sur la fertilité du sol » par Hueli Hurter (Congrès d’agriculture 2017 Gœtheanum) nous éclaire enfin. « L’être humain pense. Le fondement matériel-organique en est notre cerveau. La masse du cerveau doit être tout à fait morte, afin que la pensée soit claire et dirigée par le moi. L’inertie de la matière et la clarté de l’esprit sous forme de pensées se conditionnent réciproquement. La vache ne pense pas, au sens de pensées dont elle aurait elle-même conscience. La substance issue de sa digestion et transportée jusqu’à son cerveau ne devient pas complètement terrestre et inerte – et c’est la raison pour laquelle lui poussent des cornes. Celles-ci renvoient dans l’organisme les forces à demi libérées du flux des aliments, et le Moi, à l’état d’ébauche, reste lié au devenir organique. Le fumier de la vache porte en lui cette ébauche du moi. C’est ce que nous utilisons pour amender le sol. L’ébauche du Moi présente dans la fumure agit sur les racines des végétaux de façon à ce « qu’elles puissent pousser de la manière adéquate, dans le sens de la force de gravité» (GA 327, 8ème conférence) – ainsi l’agriculture est-elle une individualité en devenir. » « L’animal n’ayant pas besoin des forces que l’homme requiert pour élaborer sa conscience, elles restent disponibles et il les libère. Le ruminant, et en particulier la vache, possède, grâce à ses quatre estomacs et son long tractus digestif (40-45 m), une capacité de digestion intensive qui peut transformer d’énormes quantités d’aliments….Cette faculté lui permet non seulement de satisfaire les besoins de son propre organisme et d’assurer la production de lait, mais aussi d’élaborer un précieux fumier ». Mais quid de la préparation 500 ? « En introduisant la bouse dans la corne de vache, et en l’enterrant dans le sol en hiver, on renforce les forces libérées par les processus digestifs et on les renvoie dans la bouse. La croissance de la plante reflète le processus de respiration de la terre: au printemps, expiration, en automne, inspiration. En hiver, la terre est prête à absorber de nouvelles forces du cosmos. A l’aide des forces du cosmos, les substances du sol et de l’air sont transformées par la plante en substances vivantes, animées par l’animal dans la digestion, et fécondées par le cosmos dans la corne qui est enterrée dans le sol. Les forces contenues dans cette substance sont transmises à l’eau par le brassage, entraînant la formation de tourbillons. Elles seront apportées au sol et aux jeunes plantes pour les vivifier lors de la pulvérisation. »… « Ayant enfoui la corne remplie de fumier, nous conservons dans celles-ci les forces que la corne de vache avait l’habitude d’exercer à l’intérieur même de la vache, à savoir réfléchir l’éthérique et l’astral. » En fait la bouse n’est pas le résidu de la digestion imaginé mais plutôt…de la matière cérébrale. Toujours selon H.Hurter « Qu’est-ce que la masse cérébrale ? C’est tout simplement de la matière fécale conduite à terme. L’excrément cérébral qui ne parvient pas à son terme est éliminé dans l’intestin. A en juger d’après les processus auxquels il est soumis, le contenu de l’intestin est de même nature que le contenu du cerveau. » Et de conclure : « En termes caricaturaux, je dirais que ce qui est dans le cerveau, c’est un tas de fumier à son stade supérieur ; mais la comparaison est en tous points conforme à la réalité. » A ce stade j’ai un peu la nausée… Et si je décide de suivre à la lettre la recommandation de Rudolf : « Il est nécessaire de conserver notre claire capacité de jugement, notre capacité de juger des événements extérieurs, (…) de ne pas nous laisser embrumer par toutes sortes d’occultismes. Nous avons besoin de juger clairement des processus de la vie, ce qui nous préserve de tomber dans le panneau trouble de la charlatanerie occultiste, notamment de ce qui émane de certains centres où sont poursuivis des buts éloignés de toute recherche pure de la vérité, par la pêche en eaux troubles. » Rudolf Steiner, Munich, 18 mars 1916 – GA174a Sans bouse dans la corne, je ne serai jamais biodynamiste.
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